Dawn Of A New Era | Libre

J'étais arrivé au fameux Institut du Professeur Xavier la veille. Deux choses m'avaient frappé. Il faisait bien plus froid ici et quelques failles de sécurité m'avaient saut aux yeux. Oh, rien de réellement visible pour quelqu'un n'ayant pas eu une formation spéciale visant à les repérer. Savoir en jouer faisait aussi partie de mon travail avec la BOPE. En plus d'échanger des tirs croisés avec les narcotrafiquants. Ces réflexes étaient devenus comme une seconde nature. Malgré les années loin de l'armée, ils étaient toujours là. Tout comme le soin particulier que je mettais à mes entraînements matinaux.

Ce matin là, j'avais quitté ma chambre à l'Institut après une nuit agitée. Il me fallait toujours un certain temps pour arriver à dormir sereinement dans un nouveau lieu. J'appelais ça de la prudence quand d'autres parlaient de paranoïa excessive. Vu ce que les américains avaient l'air de penser des mutants, j'allais sans doute mettre du temps à dormir sur mes deux oreilles. Peut être même que je n'y arriverai jamais.

J'avais enfilé un short de sport et mes chaussures avant de me lancer torse nu dans l'aube naissance. J'allais courir tout autour du parc entourant l'institut. Ce serait une façon pour moi de rester en forme – je courrais tous les jours depuis tant d'années que c'était devenu une véritable routine pour moi – mais également d'inspecter le périmètre. De repérer les principaux points de vue qu'il faudrait contrôler mais également le chemin le plus probable qui pourrait être emprunté en cas d'attaque sur l'Institut.

J'étais totalement concentré sur ma tâche, mon cardio parfaitement maîtrisé, enchaînant une foulée puis encore une autre en un rythme bien rodé. Je prenais mes marques dans ce nouvel environnement, le faisant mien tandis que j'appréhendais mon nouveau territoire. J'étais de ces prédateurs qui pouvaient rapidement se sentir chez eux n'importe où. C'était ancré dans mon cerveau reptilien. S'adapter ou mourir. En parlant de cerveau reptilien, je me figeais subitement dans ma course, rejetant mes cheveux humides en arrière avant de me retourner. J'avais senti une présence et j'étais bien décidé à découvrir de quoi il retournait.

Cherchant l'intrus qui avait perturbé ma concentration, mon regard se bloqua dans deux prunelles qu'encadraient un visage adolescent. Une pensionnaire de l'Institut, sans beaucoup de doutes possibles. A peine nos regards se furent-ils accrochés qu'elle détournait pudiquement la tête, m'arrachant un sourire en coin. Ah, ces américains et leur pudibonderie. Il n'y avait rien de choquant par chez moi à courir torse nu. L'activité physique était ancrée dans notre culture et l'exhibition des corps monnaie courante. Ça n'avait rien de honteux bien au contraire. N'en avions nous pas tous un ? Je ne comptais pas mettre fin à son tourment. Je n'avais de toute façon rien pour me couvrir et, quand bien même, je ne l'aurais pas fait. Que tous ces petits oisillons à peine tombés du nid s'y fasse vite, je n'avais pas l'intention de changer l'une de ces routines qu'imposait le contrôle total que j'exerçais sur mon corps et sur ma vie.

Moins craintive que je ne l'aurais cru au premier abord, la gamine s'approcha de moi d'un pas traînant. Apparemment, elle ne se contentait pas de m'observer, elle me voulait quelque chose. Ca ne l'empêchait pas d'avoir des airs de lapin pris dans les phares d'une voiture. Elle semblait ne pas savoir ou poser ses yeux et, si cela satisfaisait mon ego, ce n'était pas pratique pour entamer une discussion. Je lâchais donc, avec un accent brésilien assez prononcé, un petit commentaire sarcastique, pointant mon visage du doigt.

« Mes yeux sont par là, si ça peut aider. »

Elle était nerveuse, bien trop nerveuse. Je devrais sans doute essayer de la mettre à l'aise. Je ne savais pas faire ces choses là. Aussi, je me contentais de la fixer, attendant la suite. Bien conscient que mon attitude ne devait sans doute pas lui faciliter la vie. Après avoir balbutié quelques paroles à peine intelligible, son regard se posa enfin sur mon visage... Enfin, le temps de quelques secondes. Sans doute le temps qu'elle rassemble son courage pour me faire part de ce qui la tracassait.

C'était donc ça, elle ne me connaissait pas et donc, elle était inquiète. C'était bien. Au moins, elle ne faisait pas partie de la masse grouillante de jeunes mutants trop confiants que je m'attendais à trouver ici. Mon identité et la raison de ma présence ici étaient loin d'être des secrets.

« Kian. Oliveira. Le Professeur Xavier m'a embauché. Pour assurer la sécurité de l'Institut. Et aider les élèves aux pouvoirs... sensibles. »

Je n'étais pas doué pour les grands discours. Je préférais les phrases courtes. Relayer les informations de façon claire. Ne pas s'appesantir. Ca faisait partie des choses qu'on nous enseignait dans l'armée brésilienne. Gamin, je parlais beaucoup trop. J'étais agité et insupportable. Maintenant, j'étais posé, efficace. L'armée m'avait taillé à sa mesure et, malgré les années depuis que j'avais tout laissé tombé, mon maintien criait toujours 'militaire'. On ne se refaisait pas apparemment.

« Et toi, qui es-tu ? »

Si j'avais eu mes réserves sur ma capacité a éduquer une bande de gamin mutants. La crainte qui semblait exuder de tous les pores de cette jeune fille n'aurait fait que me conforter dans l'idée que je n'avais rien à faire là. Une chance que le doute ne fasse pas vraiment partie des choses que je pratiquait. J'étais venu ici avec un objectif précis auquel je comptais m'atteler. Peu importe s'il avait peur de moi. Je n'étais pas venu pour devenir leur ami mais pour les préparer à survivre et à se fondre dans le monde. C'était bien plus important. La petite s'emmêlait dans ses explications, s'enfonçant un peu plus à chaque fois qu'elle ouvrait la bouche. Je décidais d'abréger son supplice.

« On a toujours besoin d'être protégé. Ou au moins d'en avoir la possibilité. Je ferais en sorte que rien de fâcheux n'arrive. »

Je balayais ces excuses d'un petit mouvement de tête, tâchant de me montrer le plus doux qu'il m'était possible. Quoi que cela devait sans doute rester un peu effrayant pour des adolescents. Je n'en savait trop rien j'en avait assez peu côtoyé. Ma nièce était encore toute gamine la dernière fois que je l'avais vu en personne et mes frères et sœurs étaient tous plus âgés que moi.

Sans doute intimidée, elle avait déjà commencé à faire demi tour quand je lui avais demandé son nom. Mettre des noms sur tous leurs visages, cela faisait aussi partie de mon travail. Pour pouvoir remarquer quiconque chercherait à s'infiltrer dans l'école. Deux pas en arrière, un pas en avant, voilà qu'elle s'approchait à nouveau de moi pour me dévoiler son nom.

Du coin de l’œil, je guettais le coin de verdure duquel une voix masculine fini par se faire entendre. Encore un gamin. Ils étaient bien matinaux dit donc. Je le laissais s'approcher de moi à son rythme. Imprégnant ses traits dans ma mémoire. A sa remarque concernant le nom de la jeune fille, je commentais d'un simple :

« Et toi, quel est le tien ? »

Croisant les bras sur ma poitrine en une position qui, bien que rigide, s'apparentait le plus à une position de repos, je détaillais tour à tour les deux adolescents. Ils se connaissaient semble-t-il. Pas assez pour en être venu aux présentations pourtant. Aucun d'eux n'avait l'air très loquace. Quoi que le garçon semblait arriver à aligner plus de mots à la suite. Sa question était d'ailleurs pertinente. Et j'appréciais la pertinence.

« Je dois d'abord faire le point avec le Professeur Xavier. Mes cours sont en effectif réduit. Pour des mutants dont la puissance et l'absence de maîtrise sont... problématiques. »

Mon regard se fit plus déterminé et mon bouclier plus chatoyant tandis que je le faisais onduler sous leurs yeux, le rendant plus apparent bien qu'il soit à même ma peau.

« Disons que j'ai les moyens de les canaliser. »

Mon pouvoir était loin d'être un secret mais c'était assez amusant, de ne pas tout dire pour le moment et de les laisser imaginer. Peut être même sortiraient-ils de leur semi mutisme qui sait.